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Re: Icones de licences pour auteurs anonyme et oeuvres anciennes


From: Valentin Villenave
Subject: Re: Icones de licences pour auteurs anonyme et oeuvres anciennes
Date: Fri, 18 Mar 2016 20:09:40 +0100

2016-03-07 17:01 GMT+01:00 legoss <address@hidden>:
> Peux-tu expliquer ce point. Je pensais, au contraire, que la qualité
> "Copyleft" d'une œuvre lui permettait de s'approcher le plus possible du
> domaine public...

Bonjour Laurent (désolé, je ne suis pas souvent sur la liste -fr),

Alors, c’est un point un peu délicat effectivement, mais pas tant que
ça si l’on s’entend sur la terminologie.

-> "Copyright Tartempion [année XXXX]" veut dire "le dénommé
Tartempion est considéré comme détenteur des droits sur cette œuvre à
compter de l’année XXXX". À ce titre, il est le seul à avoir tous les
droits sur cette œuvre, y compris interdire ou monnayer sa diffusion
ou céder cette responsabilité à un tiers (éditeur, société de gestion
collective).

-> "Tous droits réservés" est le régime par défaut du copyright. Si
Tartempion ne donne aucune indication spécifique, toute
reproduction/représentation/divulgation sera interdite ; si Tartempion
passe un contrat avec tel éditeur ou tel autre intermédiaire, c’est
cet intermédiaire qui sera (exclusivement, en général) autorisé à
faire exploitation de l’œuvre.

-> "Licence Trucmuche" indique que l’œuvre n’est pas soumise au régime
par défaut, mais à un autre document (la licence) par lequel
Tartempion donne au public certaines permissions (mais seulement
certaines, et seulement sous certaines conditions).

-> Copyleft est une de ces permissions, selon laquelle "Si vous créez
une version modifiée, vous devez la publier sous la même licence que
l’œuvre d’origine". Ce que les licences Creative Commons nomment
"share-alike" ou SA. Mais toutes les licences n’incluent pas cette
clause.

-> "CC0" ou "Public Domain Dedication" ou autre, indique que
Tartempion a déclaré vouloir renoncer à tous ses droits sur l’œuvre
(je ne parle pas seulement de "droits" au sens de "pognon", mais aussi
au droit d’autorisation, de restrictions, etc.). En droit français,
c’est plus symbolique qu’autre chose pour deux raisons :
----> Le droit dit "moral" est irrenonçable (c’est vrai, où
irions-nous ; ce serait la chienlit et la barbarie).
----> Parmi le droit moral de l’auteur, figure le droit de retrait et
de repentir : du jour au lendemain l’auteur peut changer de licence,
voire faire basculer son œuvre dans un régime plus restrictif. Super
sympa.

-> Domaine public veut dire "Personne ne peut plus appliquer de
restrictions sur cette œuvre", et donc "cette œuvre n’est entravée par
aucune restriction". (Ce qui est faux en France, puisque le droit
moral est _perpétuel_ et peut être appliqué par les lointains
lointains descendants.) En d’autres termes, Tartempion n’existe pas.

Donc il existe une différence fondamentale entre une œuvre sous
copyright (quelle que soit sa licence, même si elle est sous copyleft
ou sous CC0) et une œuvre dans le domaine public. Le Copyleft *est*
l’un des régimes du copyright, ce n’est pas du tout la négation du
droit d’auteur.

> - Celle dont l'auteur est connu et dont l'ancienneté l'a faite passer dans
> le domaine public:  ce logo
> <http://coreight.com/sites/default/files/publicdomain.large.png>   mais pas
> celui-là
> <https://lesoufflenumerique.files.wordpress.com/2015/09/licence-cc-by.png?w=560&h=197>

Oui, absolument.

> - Pour une œuvre anonyme dont l'ancienneté avérée l'a faite passer dans le
> domaine public: s'assurer au préalable qu'elle soit suffisamment répandue et
> connue pour que personne ne puisse s'en attribuer la paternité, puis,  ce
> logo <http://coreight.com/sites/default/files/publicdomain.large.png>

Oui, absolument. Sachant que tu n’auras jamais une telle garantie : il
est toujours possible que quelqu’un sorte du bois avec un document
prouvant que son arrière-grand-oncle (ou en droit moral français, son
arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père) avait écrit une version
antérieure de l’œuvre (ou de quelque chose qui y ressemble vaguement,
comme dans le cas de «Happy Birthday to You»).

Mais par principe, oui; le © barré correspond à l’absence de copyright.

> - Pour une œuvre anonyme dont l'ancienneté n'est pas confirmée: Avoir au
> moins la certitude *absolue* de son ancienneté, puis, au-delà de 70 ans,  ce
> logo <http://coreight.com/sites/default/files/publicdomain.large.png>  .

Oui. Sachant qu’en France on parle de 70 après la *mort* (sachant que
s’il a pris un rhume parce qu’un soldat allemand avait éternué dans un
rayon de 30 km, le gars se retrouve avec 20 ans en bonus pour la
Nation reconnaissante ; et que de toute façon il faut également
ajouter quelques années en plus car les années de guerre comptent
double et, comme chacun sait, la première Guerre Mondiale se termine
en 1920 et la seconde en 1947). Donc, tu peux compter 100 ans à la
louche.

(Et attention : pour les œuvres non-publiées du vivant de l’auteur, le
copyright court à partir de la *publication* et non de la mort du
gusse. C’est comme ça qu’on se retrouve avec des partitions de
Debussy, mort en 1918, qui n’entreront pas dans le domaine public
avant 2071. #toutvabien)

> 2. Pour les œuvres qui, en France, ne sont pas dans le domaine public, la
> licence la plus ouverte est la ccby.

Parmi les CC, oui. Mais sinon tu as http://sam.zoy.org/lprab/ :-)

> Une œuvre anonyme est une œuvre dont la paternité ne peut être attribuée.
> donc pas de ccby.
> Supposons qu'elle soit récente (moins de 70 ans). Elle n'est pas non plus
> dans le domaine public. Donc pas  de ça
> <http://coreight.com/sites/default/files/publicdomain.large.png>   non plus.
> 1. Existe-t-il une licence pour ce cas de figure?

Non. La seule personne qui pourrait appliquer une telle licence à
l’œuvre en question, c’est son auteur. Si son auteur est mort, aucun
de ses ayants-droit ne prendra la responsabilité de relicencier son
œuvre sous des clauses plus permissives.

> 2. Tant que les choses restent en l'état, son caractère anonyme
> autorise-t-il néanmoins son édition, sa transmission, une utilisation
> commerciale et des œuvres dérivées?

S’il n’existe aucun ayant-droit aux alentours, et si elle n’est pas
dans l’escarcelle d’une société de vautours collectifs, personne ne te
reprochera d’en faire usage. Mais c’est un risque à courir. (Dans
l’hypothèse où, cf plus haut, quelqu’un sortirait du bois.)

Mon opinion personnelle (mais IANAL) est la suivante : on peut
s’asseoir sur le régime tous-droits-réservés (et heureusement, sans ça
un bon tiers de la population française serait en taule), mais il faut
aussi avoir un parapluie prêt à ouvrir. (cf ci-dessous)

> 3. Si oui, que se passe-t-il dans la cas où le père de l'œuvre ou ses
> héritiers se manifestent, preuves à l'appui, pour faire valoir leurs droits,
> et réclamer leur dû?

-> si c’est pour publier sur le Web, dans l’hypothèse où quelqu’un
râlerait, il est aisé de le mettre hors-ligne immédiatement (quitte à
vérifier la légitimité de sa requête). Et du coup tu es en mesure de
prouver ta bonne foi, et il devient plus difficile pour les
ayants-droit de prouver que tu leur as causé un préjudice.

-> si c’est pour publier sur papier, j’y réfléchirais à deux fois.
Parce que 2000 exemplaires au pilon à cause de deux lignes dans un
coin, ça fait mal quelque part. Dans ce cas, les plaignants sont en
position de force et ça peut faire assez mal. Surtout s’ils
s’adjoignent les services de vautours précités.

> si non, cette œuvre est-elle condamnée à rester au fond
> d'un tiroir, au point qu'au but d'un certain temps, plus personne ne se
> souvienne même de son existence?

Absolument. C’est même dramatique dans le cas des œuvres dites
orphelines, dont le seul exemplaire physique existant se déteriore
inexorablement sans que quiconque soit habilité à en réaliser une
copie ou une restauration : c’est ainsi que 129000 (ou peut-être
225000, selon les estimations) films des débuts du cinéma en Europe
sont actuellement en train de s’oxyder et de disparaître dans des
entrepôts ou des caves. Aucun ayant-droit n’a pu être trouvé, et
personne ne veut prendre la responsabilité et le risque d’investir de
l’argent dans leur restauration.

Voili voilou.

Cordialement,
Valentin.



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